Cancel Culture : sensibilité vs liberté

Article – Le phénomène de Cancel Culture fait de plus en plus parler de lui en France. Venue tout droit des États-Unis, cette pratique de destruction d’une réputation entraîne des conséquences sérieuses pour la carrière, le moral et la vie personnelle d’un individu ayant exprimé un avis ou commis une action pouvant heurter les sensibilités. Une phrase ou un tweet peuvent suffire. Démarre alors une chasse aux sorcières, qui s’organise via les réseaux sociaux, mais loin des tribunaux.

L’expression semble faire son apparition dans les années 1990, après que l’acteur Wesley Snipes prononce la phrase suivante: “Cancel that bitch” (“supprime cette s***pe”) dans le film New Jake City, en évoquant son ex-compagne. Une expression reprise et popularisée par le rappeur Lil Wayne dans son titre I’m single, en 2010.

Sensibilité vs Liberté 

Le principe fondamental de Cancel Culture est celui qui affirme que notre sensibilité concernant un sujet (le racisme, l’homophobie, la grossophobie, ou toute forme d’injustice) prévaut sur la liberté d’expression et de débat. 

Un discours qui offense ne donne pas lieu à des échanges constructifs et argumentés, c’est la partie émotionnelle qui prend le pas sur le factuel. Des propos catalogués comme intolérables n’ont plus le droit d’exister. La caractéristique principale de la Cancel Culture réside dans le fait que le discours en question n’est généralement pas condamnable juridiquement. C’est la seule notion d’“immoralité” qui valide la dénonciation des insurgés. 

Le point de vue de la communauté “blessée” n’est pas toujours partagé par le plus grand nombre. Souvent le mouvement du soutien d’un individu “fautif” s’organise. Seulement, la pression exercée est assommante, et l’aura de ces scandales suffit généralement à causer des dégâts irréversibles dans la vie et la carrière d’un individu.

Cancel Culture comme contrôle public progressiste     

Les racines de la Cancel Culture sont très anciennes. Ce “contrôle public” exercé par la société fait partie des mécanismes classiques de l’auto-défense d’un socium. Les personnes qui exprimaient des avis différents de ceux partagés par la majorité, à toutes les époques, étaient ostracisées. 

Dans le cas de la Cancel Culture contemporaine, ce n’est plus la majorité qui dicte ses lois mais un parti qui s’avère parfois minoritaire. Cette évolution est présentée comme un avancement important et progressiste. Nous sommes désormais plus nuancés et plus attentifs à ces communautés qui n’avaient pas droit à une telle délicatesse d’approche dans le passé. 

Quand tout devient Cancel Culture

Cette évolution, au lieu de nous rendre plus inclusifs, semble nous conduire vers une multiplication des cas d’exclusion. Des acteurs, des écrivains, des chanteurs, des politiques… Nombreuses sont les personnalités publiques à susciter la colère à la suite d’un acte ou d’une phrase apparue sur le toile. 

Car c’est effectivement le web qui remplace aujourd’hui la “place publique” des temps passés. Internet, sous couvert de cet anonymat des profils, facilite l’injure et les appels à la haine. Sur le web, on sait tout, on juge tout, et le jury populaire rend les verdicts: “Chasser!” “Licencier!” “Exclure!”, “Retirer!”.

Doit-on juger une personne sur la base d’une seule phrase ? L’avis qui blesse une partie de la population doit-il conduire à une exclusion définitive d’une personne d’un espace public ? L’œuvre peut-elle être séparée de son auteur? De l’artiste? Ou doit-il aussi passer aux oubliettes une fois la condamnation sociale prononcée? 

La Cancel Culture, c’est du cas par cas. Aucune affaire n’apportera la même réponse. Cependant, un débat sur ces sujets ne sera que bénéfique pour la société. 

Chez Caracteres on a décidé de vous proposer une série de vidéos revenant sur les différents cas de Cancel Culture. Car c’est là notre ADN: ouvrir le débat, permettre un accès à l’information, et donner matière à réflexion. Le tout grâce à cette liberté d’expression qui nous est chère. 

La rédaction a choisi de revenir sur ces cas de Cancel Culture qui ont créé la polémique, mais ne cautionne en aucun cas les propos des personnalités en question et reconnaît qu’ils ont pu offenser des communautés et des individus.

Notre série vidéo sur la Cancel culture est à retrouver sur notre chaîne Youtube : https://www.youtube.com/channel/UCMPaqlhXX8PZfjQng3yIO5A