L’histoire de la pilule contraceptive. De la libération de la femme au pilulocentrisme.

Infographie – L’histoire de la pilule contraceptive longe celle du droit des femmes. Lorsqu’elles revendiquent le droit de disposer de leur corps à partir des années 60, les industries pharmaceutiques investissent le marché florissant de la pilule. Lorsqu’elles réclament une réappropriation et un partage des charges contraceptives en 2020, les laboratoires accélèrent la mise au point d’une pilule masculine. La rédaction de Caractères vous propose un retour en dates sur ces évolutions entrecroisées. 

1920 : La France traverse une crise démographique au lendemain de la Première Guerre mondiale. La “propagande anticonceptionnelle” et la “provocation à l’avortement” sont interdites.

1956 : Gregory Pincus, médecin américain et spécialiste de la reproduction des mammifères, met au point la première pilule contraceptive. Sous couvert d’une surpopulation, le médicament est rapidement testé à grande échelle sur les femmes haïtiennes et portoricaines. 

1958 : Lors de sa dernière année de pontificat, le pape Pie XII condamne et juge immoral l’emploi de la pilule à des fins contraceptives. Dix ans plus tard, Paul VI réprimande à nouveau son utilisation dans l’encyclique Humanae Vitae. Ses propos engendrent le désaveu et la réprobation d’un grand nombre de femmes catholiques. Pourtant, en 2008 Benoît XVI célèbre les 40 ans de l’encyclique sans l’ajuster, car l’unique contraception demeure “l’observation des rythmes naturels de la fertilité de la femme”. L’actuel pape François soutient qu’éviter une grossesse n’est pas un mal absolu en comparaison à l’avortement qui reste un crime au regard de l’Église catholique.

1967 : Loi Neuwirth. 

La loi relative à la régulation des naissances portée par Lucien Neuwirth est votée. Elle abroge la loi de 1920 en rendant l’usage de la pilule contraceptive légal. Les controverses et les contestations retardent son application, il faut attendre 1972 pour constater sa mise en œuvre. 

  • Les conditions de fabrication, d’importation et de vente sont définies.
  • La pilule est délivrée sur ordonnance uniquement en pharmacie et avec autorisation parentale pour les mineurs.

1974 : Les lois Veil.  Défendue par Lucien Neuwirth et Simon Veil alors ministre de la Santé, la loi de 1974 outrepasse celle de 1967. Le recours à la pilule comme méthode de contraception se généralise parmi toutes les classes sociales. Un an plus tard, la loi Veil légalise l’interruption volontaire de grossesse. 

  • La contraception est remboursée par la Sécurité sociale.
  • Pour les mineurs, l’anonymat et la gratuité de la contraception sont assurés grâce aux centres de planification.

 « Ce qu’il faut, c’est faire entrer la contraception dans le droit commun, la dédramatiser, en faire un acte médical comme un autre. » Simone Veil. 

2012 : Affaire Larat. Marion Larat est la première française à porter plainte pour « atteinte involontaire à l’intégrité de la personne » à la suite de son accident vasculaire cérébral survenu à ses 18 ans. Elle réclame la reconnaissance des liens de causalité entre son accident et la prise de la pilule 3e génération, Meliane. 

En 2018, après avoir fait appel, son dossier est finalement instruit au pénal et une indemnisation est octroyée. Marion Larat est reconnue comme victime d’un accident médical non fautif par la justice et a pu percevoir des indemnités pour préjudices subis. Une centaine de cas identiques sont en cours et dénoncent la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques. 

2013 : Le scandale Diane 35. Ce médicament, à l’origine antiacnéique, est largement prescrit comme contraceptif. Rangé dans la catégorie des pilules de 3e génération, il est retiré de la vente pendant trois mois avant d’être de nouveau autorisé.

Les pilules 3e et 4e générations sont dénoncées comme responsables d’embolies pulmonaires et d’AVC. Selon l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), les utilisatrices des pilules de 3e et 4e générations sont deux fois plus exposées aux risques de thromboses que les utilisatrices de pilules de 1er et 2nd générations. 

2018 : Selon un sondage de l’Institut français d’opinion publique 32 % des femmes utilisent la pilule comme moyen de contraception contre 40 % en 2010.

2019 : La première phase d’essai clinique pour le contraceptif masculin “11-beta-MNTDC” est passée avec succès. En 2020, aucune pilule contraceptive masculine n’est présente sur le marché.