SPOUTNIK V : le vaccin qui divise l’Europe?

Actualités« L’Union européenne n’a pas besoin du vaccin Russe Spoutnik V (…) les Russes ont un mal fou à le fabriquer et il faudra sans doute les aider », avait annoncé le 21 mars dernier Thierry Breton, commissaire européen chargé de la vaccination. Considéré par les autorités russes comme l’un des antidotes les plus efficaces, le vaccin Spoutnik V sème la discorde dans certains pays. Outil de propagande ou solution pour accélérer la vaccination ?

La rédaction de Caractères décrypte pour vous en 4 points le vaccin russe Spoutnik V.

Retrouvez notre vidéo à la fin de l’article.

Spoutnik V
Vaccin Spoutnik V
© Oasisamuel, Adobe Stock

1. Premier vaccin contre le COVID-19 ?

En août 2020, avant les tous premiers essais cliniques à grande échelle, la Russie annonce déjà l’efficacité de son vaccin Spoutnik V. Mis en place avec une rapidité hors du commun, il fera beaucoup douter la communauté scientifique internationale. Depuis, The Lancet a validé le vaccin, estimant son efficacité à 91,6%. Son coût est en dessous de la moyenne des autres vaccins, et il est également plus facile à conserver et à transporter.

Le Spoutnik V serait-il alors la solution mondiale ?

En Russie, seulement 6 millions de doses ont été administrées, en 3 mois de campagne vaccinale. L’objectif de départ était de 20 millions d’ici fin mars. Le pays est encore loin du compte : manque de confiance, doutes, difficultés d’organisation ? D’après un sondage indépendant, seulement 30 % des russes sont prêts à se faire injecter, un chiffre en baisse de 8 % depuis le début de la campagne selon le centre indépendant russe LEVADA.

2. Un vaccin qui s’exporte ?

Selon les instances Russes, le vaccin Spoutnik V est désormais autorisé dans 56 pays, et couvrirait plus d’1,4 milliard de personnes. Et le grand gagnant de cette exportation russe, c’est l’Amérique latine, où le vaccin est largement diffusé. L’Argentine, un des 1ers pays à l’avoir commandé, a d’ailleurs administré plus de 600 000 doses, ce qui représente plus de la moitié de sa vaccination totale. 

En Europe, certains voient Spoutnik V comme un outil de propagande russe, d’autres comme une solution à part entière.Alors que la plupart des pays attendent la validation Européenne, la Lituanie et la Pologne l’ont d’ores et déjà refusé. La Hongrie quant à elle, est le premier et le seul pays de l’Union européenne à l’utiliser. Avec un prix aussi attractif, plusieurs pays en voie de développement se sont aussi positionnés pour recevoir des doses.  Mais d’après Thierry Breton, la Russie peine à fabriquer et à livrer les quantités demandées…

3. Un vaccin sous tension diplomatique ?

Actuellement en cours d’examen par les institutions Européennes, les avis des dirigeants restent divisés. D’après certains spécialistes, Moscou utiliserait son vaccin comme “diplomatie” pour semer la discorde en Europe. Malgré un contexte sanitaire grave, les tensions se poursuivent. Poutine, de son côté, dénonce une campagne anti-Spoutnik-V.

« Nous ne forçons personne à faire quoi que ce soit (…) mais nous nous interrogeons sur les intérêts que défendent ces gens, ceux des entreprises pharmaceutiques ou ceux des citoyens européens ? »

 Vladimir Poutine / Le Parisien, le 22 mars

Les autorités russes se disent prêtes à fournir des vaccins et à collaborer avec les Européens pour sa fabrication. L’Allemagne, elle, s’est déjà positionnée : 

« Concernant le vaccin russe Spoutnik V, je préférerais une commande européenne, mais si celle-ci n’arrivait pas, et je n’ai aucun là-dessus, alors l’Allemagne devrait agir pour elle-même, et c’est ce que nous ferons. »

Angela Merkel / Le Figaro, le 19 mars 2021

Quant à l’Italie, un accord de production a déjà été trouvé, mais les premières doses ne sortiront de leurs usines qu’en juillet prochain. Aujourd’hui, des négociations sont menées avec plusieurs sites industriels européens, dont certains en France. 

4. Le vaccin Russe bientôt en France ?

Emmanuel Macron a annoncé une accélération de la campagne de vaccination, mais il n’est toujours pas favorable à l’utilisation du Spoutnik V. Le Président préfère jouer la carte de la sécurité et attendre le feu vert du régulateur européen, qui se prononcera en mai ou juin prochain.

Dans l’hexagone, les politiques ne sont pas tous d’accord sur le sujet :

« Moi je souhaite qu’il y ait le vaccin russe en France. S’il y avait pu y avoir le vaccin cubain oui, le vaccin anglais oui, le vaccin chinois, tous les vaccins du monde pour tirer d’affaire le plus de monde possible […]. »

Jean-Luc Mélenchon / FranceInter, le 22 mars

« A mon avis, la manière dont c’est géré, c’est plus un moyen de propagande et de diplomatie agressive, qu’un moyen de solidarité et d’aide sanitaire. »

Jean-Yves Le Drian / FranceInfo, le 26 mars

Vous l’aurez compris, l’autorisation du vaccin russe dans l’hexagone n’est pas encore pour demain. Ce 29 mars, la France n’a délivré une dose de vaccin qu’à 9,8 % de la population. Et seuls 2,5 millions des Français ont reçu leur double dose.